Le lapin est presque un personnage littéraire avant d'être un animal.
Seul animal à être aussi précisément humanisé par le prénom, il est un "personnage" emblématique.Dans la Gaule post-romaine, le lapin est devenu un gibier, mais aussi un produit agricole, voire un compagnon vivant au sein de la maison d'habitation ou dans le clapier proche.
On ne doit donc pas s'étonner que dans la conversation courante la référence au lapin se soit faîte si nombreuse:
- son caractère gracieux, sa gentillesse et sa douceur ont suscité des termes d'affection du type "mon lapin", "mon petit lapin".
- le soin qu'il porte à sa toilette à donné "propre comme un lapin" (Larousse du XX°siècle)
- sa rapidité à fourni: "courir comme un lapin"
- son habileté à échapper aux poursuites a créé le compliment "c'est un fameux lapin" qui peut signifier aussi "homme rusé". Dès 1789, en argot, un "lapin ferré" désignait "un cheval". En 1809, le même "lapîn ferré" signifie "gendarme".
- les instincts amoureux attribués au lapin donnent "un chaud lapin" pour indiquer un personnage galant et gaillard. Comment ne pas citer dans ce même ordre d'idée le film de Pascal Thomas avec Bernard Ménez "Le chaud lapin" -1974- où un jeune Casanova est contraint, le temps des vacances avec sa famille, de tempérer ses ardeurs. Frustré d'être isolé en pleine campagne, il se met en tête de séduire coûte que coûte.
- la fécondité de la lapine justifie l'attribution du mot "lapine" à une femme qui à beaucoup d'enfants. D'où les mots de "lapinage", "lapiner"" utilisés pour désigner dans le bas peuple les péripatéticiennes ou la prostitution.
- la fourrure de lapin de par sa valeur moyenne (lorsque sa production est mal maîtrisée!) a donné "vison de clapier" pour des manteaux de faible élégance. Les chansonniers de Montmartre, en terme de mépris à l'égard de certains hommes politiques du "Cartel des gauches" et du "front populaire", les traiterons de "socialistes en peau de lapin".
- certaines expressions ont disparu du langage actuel comme "lapin" pour apprenti, terme en usage dans l'argot des métiers du XIX°siècle, où pour faire référence à l'étourderie du jeune: "lapin de 6 semaines"
- dans les zones viticoles du Sud de la France "fa de lapins" (faire comme les lapins) pour les ouvriers agricoles (souvent payés à la tâche) qui remuent la terre en surface afin de laisser croire qu'il l'ont travaillé en profondeur.
et enfin l'expression usuelle (et très curieuse) "poser un lapin" qui se réfère à un mode particulier de l'élevage du lapin sur une étagère (voir gravure ci dessus) ou une
planchette qui immobilise l’animal sur une surface étroite dont il ne peut bouger, ce qui (on le pensait) favorise son engraissement. Cette position inconfortable a servi dans l'argot des
messageries et diligences pour une pratique frauduleuse de la part des cochers.Ceux-ci plaçaient fréquemment certains passagers clandestins, moyennant gratification, comme des lapins sur
l'étagère destinée aux bagages placée au dessus des voyageurs. Cette fraude a signifié par la suite "tromper", ne pas tenir ses engagements, partir sans payer, ne pas payer une femme
galante...
Ainsi, "faire le coup du lapin" n'a rien à voir avec "poser un lapin". Elle se réfère à la manière dont on assommait un lapin d'un coup sur la nuque, d'où le sens d'attaquer par derrière, par traîtrise.
(d'après Jean-René Viellefond)
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